Le goût des femmes laides.

MILLET Richard

À huit ans, découvrir dans le regard et les mots de sa mère que l’on est laid ouvre un abîme de honte et de culpabilité. Dès lors, chassé de l’enfance, le jeune garçon devra porter jour après jour le poids de cet opprobre. De son Limousin natal à Paris, de ses premières classes au poste de rédacteur en chef, apprécié, d’un journal politique, il traîne ce boulet dont ni la réussite professionnelle ni la fréquentation de toutes sortes de femmes ne peut le délivrer. Caparaçonné pour éviter d’être amoureux, brûlant d’un désir qui le ronge, il tente de s’enivrer dans des relations sexuelles passagères.

 

En de longues phrases rythmées, servies par un vocabulaire choisi, l’auteur dissèque la souffrance indicible qui claquemure dans un orgueil désabusé, glacé. Il débusque la laideur sous toutes ses formes, dénonce le conformisme, le poids des apparences, les bons sentiments. Amertume, cynisme et en deçà, soigneusement refoulée, la folle espérance d’un amour impossible, c’est tout cela qui est décrit dans une langue dont la beauté avait déjà été soulignée dans Le cavalier siomois (NB avril 2004).