Pontée

HONORÉ Jean-Paul

Embarqué à bord d’un porte-conteneurs français à Ningbo, en Chine, il y passe un mois parmi les vingt-sept membres de l’équipage, seul passager sur ce mastodonte de quatre cents mètres qui, chargé, pèse deux cent quarante mille tonnes. Il découvre le rituel rigoureux et codé du quotidien, observe la surveillance pointilleuse des innombrables machines et réalise la menace toujours présente de l’erreur, de l’accident. Dans les ports, il admire le miracle informatique qui manie les lourds conteneurs. Tout l’intéresse, les hommes, la mer, les grues, les essuie-glaces du poste de pilotage ou un « pare-rat » inattendu.  Un journal de bord, peu ordinaire : poétique, drôle, minutieusement descriptif… L’humain y parvient à animer l’inhumanité brutale de l’environnement. Pas d’itinéraire suivi, les thèmes se succèdent, l’aménagement du bateau, l’insécurité, les odeurs, les repas, les escales, le canal de Suez… Quelques scènes amusantes, émouvantes… Jean-Paul Honoré, poète et linguiste, peut utiliser un vocabulaire technique mais il esquisse aussi en mots délicats la vision inattendue d’une femme grutière, détaille un albatros, s’amuse des listes cocasses de marchandises rédigées par les Chinois, des phrases « d’anglais décomplexé » utilisé à bord. Déroutant par l’éclatement du texte, insolite, le voyage avec ce compagnon observateur, sensible et malicieux ne se regrette pas. (M.Bi. et M.W.)