Les braconniers d’histoires

HUSTON Nancy

C’est ainsi que Ecrivain A raconte à Ecrivain B que, dans un café quelque part au Moyen-Orient, un vieil homme, très pauvre mais invétéré joueur de dés, avait tout perdu. La coutume étant que le perdant paye la tournée aux gagnants, il ne put s’acquitter de sa dette auprès du patron. Celui-ci décida alors de garder le seul bien du vieillard, son dentier, jusqu’au remboursement de sa dette, lui accordant toutefois l’autorisation de revenir chaque soir au café pour manger son sandwich ! Séduit par cette histoire, Ecrivain B s’en empare, la transforme, l’améliore et l’insère dans un recueil de nouvelles. Quant à l’Ecrivain C, Nancy Huston, elle « tricote » le tout pour en faire cette farce littéraire parfaitement construite et ciselée : démonstration vivante de l’exploitation des moindres fragments de réalité que peut rencontrer un écrivain. Des images surréalistes créent une ambiance qui convient bien au texte. Elles accompagnent pas à pas chaque étape du récit, que le thème, dans sa « technicité », adresse aux plus grands.