Le bibliothécaire

ELIZAROV Mikhaïl

Dans la Russie du XXIe subsistent de rares exemplaires des insipides romans de Gromov, un obscur écrivain soviétique ; ils possèdent le pouvoir étrange d’emporter les lecteurs dans une euphorie mystique. Agglutinés en chapelles rivales dirigées chacune par un « bibliothécaire », les fanatiques de Gromov recherchent et se disputent à mort les quelques titres restants. Aliocha, un étudiant raté, venu au fin fond de la Russie pour s’occuper de l’héritage de son oncle, un ex-alcoolique « bibliothécaire », se laisse entraîner dans ces combats à l’arme blanche, barbares, sanglants, incessants.

 

Que ce roman de quatre cents pages ait été couronné par le Russian Booker Prize est un mystère. Tous les personnages sont des ratés, des parvenus, des tarés divers, tous ont une capacité certaine à humilier, violer, torturer, tuer, avilir. Les relations entre eux sont de mécaniques rapports de force et de servilité, le héros narrateur n’est, comme les autres, qu’une marionnette, l’histoire n’évolue pas, répétant à satiété les mêmes scènes. Dans cet univers, pensée, réflexion autonome, sentiments, amour n’existent pas. S’il s’agit d’une allégorie particulièrement noire et désespérée de la Russie post-soviétique, sa lecture est d’un ennui pesant que rien ne vient rompre.