Fleur ; 1, 2 et 3

PARK Kun-Woong

La CorĂ©e, au dĂ©but du XXe siĂšcle, a Ă©tĂ© envahie et soumise au joug terrible des armĂ©es japonaises, puis plusieurs dĂ©cennies plus tard, dĂ©chirĂ©e par la guerre civile sans merci qui aboutit Ă  la division actuelle. Croupissant au fond d’une prison du Sud, le hĂ©ros, un homme du Nord, est l’acteur et le guide d’une Ă©popĂ©e profondĂ©ment humaine. Il se rappelle son enfance, Ă©voque sa dĂ©couverte, adolescent, de la fĂ©rocitĂ© des soldats du Sud, enfin l’engrenage qui fera de lui un soldat allant de dĂ©chirements en dĂ©sastres. L’auteur mit cinq annĂ©es Ă  rĂ©aliser ce manwha monumental, trois volumes totalisant plus de mille deux cents pages. Un dĂ©coupage trĂšs aĂ©rĂ© offre Ă  chaque planche une nĂ©cessaire respiration entre les cases conçues comme des tableaux aux couleur directes, d’un graphisme merveilleux, dense et expressif. La virtuositĂ© dans le maniement des couleurs, l’art du pinceau, l’originalitĂ© des cadrages, rĂ©ussissent Ă  exprimer toute la palette des sentiments du hĂ©ros devant chaque Ă©vĂ©nement, qu’il soit heureux ou dramatique. Les dĂ©cors, les paysages, magnifiquement croquĂ©s, savent ĂȘtre Ă  l’unisson du rĂ©cit : paisibles parfois, poĂ©tiques souvent, violents en majoritĂ©.

 Le premier volume, conçu sans aucun dialogue, est parfois difficile Ă  suivre, mais ne manque pas d’intĂ©resser et d’Ă©mouvoir. Les deux suivants sont plus accessibles grĂące Ă  quelques textes et savent faire ressentir avec intensitĂ© l’horreur pour toute guerre, oĂč qu’elle ait lieu dans le monde. Somme exigeante par sa longueur et par l’expression issue d’une autre civilisation, ce chef d’oeuvre ne sera peut ĂȘtre pas le plus demandĂ© parmi les albums du rayon BD, mais il reste nĂ©cessaire comme ouvrage de rĂ©fĂ©rence et ravira les amoureux de beautĂ©, d’authenticitĂ© et d’art.