Chien jaune

AMIS Martin

Martin Amis, romancier Ă  l’oeuvre brillante et multiforme (Cf. son autobiographie, ExpĂ©rience, NB juin 2003), offre une nouvelle fiction, parodique et provocatrice, d’une sociĂ©tĂ© britannique saisie au prisme de la salacitĂ© burlesque d’un seul journal, « The Morning Lark » (la blague matinale). Une famille royale loufoque y a pour factotum privilĂ©giĂ© un dĂ©nommĂ© Bugger (couillon). Le monde est amer, cynique, obscĂšne et brutal. Pourtant le protagoniste principal, artiste, devenu obsĂ©dĂ© sexuel aprĂšs une tabassĂ©e inaugurale du roman, finira en dĂ©votion conjugale et paternelle. À leur maniĂšre, les personnages, tous dĂ©jantĂ©s, ne visent, dans leurs errements successifs, qu’à l’amour idĂ©al.  Cette allĂ©gorie se dĂ©veloppe avec une verve truculente, nourrie de rĂ©fĂ©rences littĂ©raires : l’organisateur de la raclĂ©e initiale s’y nomme Joseph Andrews, double renvoi au roman Ă©ponyme d’Henry Fielding, contempteur en son temps de l’hypocrisie sociale et sexuelle ; si l’échange amoureux peut ĂȘtre en langage SMS, maintes variations empruntent Ă  Swift, Sterne et Joyce. Ces quĂȘtes et enquĂȘtes, aux entrecroisements multiples, menĂ©es Ă  rythme parfois vertigineux, essoufflent assurĂ©ment le lecteur qui, dans ce labyrinthe, peut aisĂ©ment se perdre.