Bambiland.

JELINEK Elfriede

En Irak, la “ troupe Ă©lue du seigneur” s’applique Ă  rendre le malheur le plus lourd possible avant d’apporter le salut. « C’est une guerre injuste, mais qui se dĂ©roule entre inĂ©gaux, c’est dĂ©jĂ  çà. » Le ton est donnĂ© et, sous l’artifice de l’humour grinçant, Elfriede Jelinek dĂ©nonce la guerre et la sophistication des moyens mis en oeuvre par la trinitĂ© Bush-Cheney-Rumsfeld. De l’intelligent missile qui s’écrase sur un marchĂ©, tuant de “grosses lĂ©gumes”, aux morts rĂ©compensĂ©s par une mĂ©daille, elle envoie d’audacieux brĂ»lots et revisite un monde oĂč une humanitĂ© doit triompher d’une autre.  Ce texte engagĂ©, scandĂ© par des phrases courtes dont les virages font passer des gagnants aux perdants, manie la dĂ©rision par la voix du narrateur. Elfriede Jelinek tempĂȘte et s’apostrophe, convoque Eschyle, la Bible, le cinĂ©ma ou la publicitĂ© en autant de clins d’oeil Ă  savourer. Elle conserve sur les Ă©vĂ©nements le regard subversif de MĂ©fions-nous de la nature sauvage (NB janvier 1996) et ce dĂ©lire parfaitement maĂźtrisĂ© qui exige du lecteur un total abandon pour goĂ»ter ce travail singulier, mais souvent jubilatoire.