Alonso et les visionnaires.

ORTESE Anna Maria

Américaine installée en Italie, la narratrice héberge un compatriote, universitaire renommé, qui l’entretient de ses relations, plusieurs années auparavant, avec Decimo, philosophe italien de la liberté absolue et dont le fils est devenu un criminel pendant les « années de plomb ». Venu visiter son père, ce dernier est assassiné. Crime jamais élucidé. C’est par la correspondance échangée entre les deux professeurs qu’on apprend les détails de cette sinistre histoire. Un petit puma apprivoisé par les fils de Decimo tient une place centrale et mystérieuse dans ces lettres. On finira par soupçonner qu’il s’agit d’une figure allégorique, mais le propos est pour le moins hermétique… Considérée comme l’égale ou presque d’Elsa Morante dont elle est contemporaine, Anna Maria Ortese a été oubliée puis redécouverte. Son oeuvre est profondément marquée par sa désespérance née de la noirceur du monde et son attirance contradictoire pour le merveilleux. Ses dernières nouvelles pleines de sensibilité (Le silence de Milan, NB janvier 2002) évoquaient déjà des thèmes pessimistes. Mais trop, c’est trop : ce dernier roman, à la thèse obscure, épuise le lecteur perdu, ballotté entre réalité, fantastique et exaltation mystique.