Une femme avec personne dedans

« Pourquoi elle et pas toi ?» C’est par ces mots terribles que la mère d’une jeune suicidée interpelle Chloé la romancière à laquelle sa fille s’identifiait. Cette dernière devient pour Chloé, désormais narratrice et héroïne, un ange annonciateur qui lui intime d’écrire « ce qu’elle sait et ce qui va arriver ». Elle s’interroge sur son identité, sur l’expérience de la solitude ; tout en invitant le lecteur à se réapproprier sa vie, elle lui propose des clés pour choisir un épilogue. L’identité et la mort parcouraient déjà Dans ma maison sous la terre (NB février 2009). L’auteur excelle à faire surgir la fiction dans le réel. Très influencée par l’OuLiPo et les pataphysiciens, loin des clichés, elle recherche une littérature expérimentale. Cela explique partiellement cette écriture détonante, noire, prenante, multiforme, cette prose scandée comme des alexandrins, cette syntaxe éclatée, ce vocabulaire occulte, ces invectives et ce récit parfois hermétique. Les nombreuses allusions à l’Apocalypse n’aident pas à la compréhension du texte. Chloé Delaume définit son entreprise comme « une politique de révolution du Je ». Elle dérange, inquiète, provoque, agace ou bouleverse, mais ne peut en aucun cas laisser indifférent.