Photo de groupe au bord du fleuve

DONGALA Emmanuel

Leur naissance ou les accidents de la vie les ont plongĂ©es dans le dĂ©nuement. Elles sont quatorze, encore jeunes, plus trĂšs jeunes, analphabĂštes, cultivĂ©es, veuves, sĂ©parĂ©es. Pour nourrir leurs enfants, elles cassent des pierres. Elles les rĂ©duisent en gravier, remplissent des sacs qu’elles vendent. Les marges bĂ©nĂ©ficiaires ont flambĂ©, le prix du sac reste inchangĂ©. MalgrĂ© son Ă©ducation, MĂ©rĂ© a dĂ» accepter ce travail pour survivre. Ni syndicaliste, ni politique, ni manipulĂ©e, elle prend conscience de l’injustice de leur situation. Avec intelligence, intransigeance et pragmatisme, elle convainc ses camarades de combattre. CooptĂ©e porte-parole, elle dĂ©couvre le pouvoir des mots. Plus forts que le statu quo.

 

Emmanuel Dongala porte sur ces femmes discriminĂ©es un regard d’une immense tendresse, connivent, respectueux, dĂ©jĂ  remarquĂ© dans Johnny Chien mĂ©chant (NB octobre 2002). Entre plaidoyer militant, fable morale et lĂ©gende africaine, le rĂ©cit s’attarde sur d’attachantes figures fĂ©minines. Le tragique est pondĂ©rĂ© par la solidaritĂ© et le pathos jamais complaisant. Quelques longueurs, un “tu” systĂ©matique quand l’hĂ©roĂŻne se raconte fatiguent parfois. Mais un ton rafraĂźchissant pour cette profession de foi dans la femme africaine. On veut croire en ce conte si optimiste, original, tonique et humaniste.