Les vaches de Staline

OKSANEN Sofi

Le mal de vivre de l’hĂ©roĂŻne, Anna, fille d’une Estonienne et d’un Finlandais, son anorexie-boulimie vĂ©cue comme une drogue dure, tiennent la place centrale dans ce gros roman. C’est malheureusement au dĂ©triment de l’autre volet du livre. Alternent avec ces longues descriptions – trop rĂ©pĂ©titives – de sĂ©ances de vomissements et de gavage, les tranches de vies de la mĂšre et de la grand-mĂšre estoniennes. La construction en flash-back dĂ©sordonnĂ©s, identique Ă  celle de Purge (NB fĂ©vrier 2011), en annonce dĂ©jĂ  les thĂšmes essentiels : souffrance des Estoniens sous la botte allemande puis soviĂ©tique dans les annĂ©es quarante, rĂ©sistance, trahisons, difficultĂ©s de la vie dans un pays communiste oĂč tout manque. Plus rĂ©ussies, ces pages traduisent trĂšs bien l’atmosphĂšre de ces annĂ©es de plomb, ce monde de la dĂ©brouille et de la tricherie. Les dĂ©sordres alimentaires d’Anna – illustration de son rejet de la Finlande et de sa nostalgie d’une Estonie rĂȘvĂ©e – semblent ĂȘtre l’écho, transmis Ă  son corps, des souffrances des gĂ©nĂ©rations prĂ©cĂ©dentes. AntĂ©rieur Ă  Purge, ce roman, nettement moins abouti, n’en possĂšde pas la mĂȘme intensitĂ© dramatique, mais rĂ©vĂšle cependant son talent de conteuse.