L’Ami Butler

LAFARGUE Jérôme

Le premier document intrigue : l’histoire, inscrite dans un panorama enlevé de la littérature latino-américaine, d’une jeune Chilienne se mourant d’un imaginaire échevelé, faute de pouvoir le transcrire en romans. Canular ? On en apprécie cependant le brio avant de prendre le train avec Johan, le héros, à travers un paysage onirique. À l’arrivée, dans le charme étrange d’une ville de nulle part, les jeux de miroirs commencent. Récits, documents se télescopent, en typographies variées, ouvrant de déconcertantes perspectives à partir de la trame centrale, palpitante : Johan est en quête de son jumeau, romancier reconnu disparu depuis quelques jours avec sa femme mourante. Tandis que la police locale les recherche, Johan lit le journal de son frère, découvre les biographies d’écrivains imaginaires auxquelles ce dernier travaillait, en rencontre les personnages de chair et d’os avant que la fiction ne bascule dans la réalité ou vice versa. Tout est savoureux dans ce premier roman, l’intrigue, d’une réjouissante adresse, les ruptures littéraires qui suscitent un doute stimulant, la fin, en boucle comme il se doit, et la désinvolte maîtrise d’un écrivain qui a sûrement d’autres cordes à son arc.