L’ambassadeur triste

DEVI Ananda

Dans l’univers des saris chatoyants, la romanciĂšre mauricienne jette un voile sombre sur l’Inde, pays d’origine de ses parents, Ă  travers onze nouvelles dĂ©senchantĂ©es. AprĂšs s’ĂȘtre penchĂ©e sur la vieillesse dans Les jours des vivants (NB juin 2013), elle porte un regard sans concession sur ce pays qui parfois se refuse, comme Ă  cet ambassadeur qui s’étiole, ou le mariage hindou, « vĂ©ritable machinerie de broyage mis en place dĂšs la naissance ». Entre illusions, chagrins et dĂ©sabusement, que l’on soit maharani ou sans caste, humanitaire ou diplomate, de part et d’autre les rĂȘves restent inaccessibles. L’Inde, pays de miracles aussi bien que d’inhumanitĂ©, inspire Ă  Ananda Devi des phrases qui ancrent le rĂ©cit dans une rĂ©alitĂ© sociale devenue faits divers. La joliesse du style, si descriptif que l’esprit s’égare aisĂ©ment dans les ruelles et dans les temples comme auprĂšs des touristes pressĂ©s de faire le bien, rĂ©serve quelques instants de poĂ©sie dans ce chaos oĂč l’auteur manie l’humour du dĂ©sespoir.