Hôtel rouge

EFSTATHIADI Maria

Un grand appartement à Athènes, une petite fille, Elli. Son père est trop souvent absent, sa mère plus exigeante qu’aimante. Un univers de silence. Enfance ! Longtemps après, Elli essaie de se souvenir, évoquant pêle-mêle moments et lieux dans une amorce de récit.  Elle est la Voix meurtrie qui rassemble les bribes sans lien de ce passé. Le Souffle lui donne la réplique à la manière du souffleur qui palliait naguère au théâtre les défaillances de l’acteur tandis que le choeur imperturbable des Oreillyeux commente, comme à distance de l’émotion. S’agit-il d’exorciser dans ce dispositif symbolique les blessures du passé? Pas uniquement. Sur cette étrange scène, la parole va, de l’un à l’autre, pour dire également, dans sa douloureuse complexité, l’obsession de l’oubli. Dans une langue au souffle lyrique, entre prose et poésie, ce texte surprenant, inclassable, met en scène le difficile itinéraire de la mémoire et du langage, vertigineusement faillibles, pour arracher au néant qui guette la trace essentielle de ce que nous aurons été. (C.B. et F.E.)