Des plumes & elle

SALOMONE Paul

Il est peintre, il ne se trouve pas beau, se voit comme un affreux hibou qui traĂźne sous une gabardine vieillotte, toute une quantitĂ© de plumes qu’il perd au moindre mouvement.  Dans son atelier vĂ©tuste, sa raison de vivre est d’immortaliser sur les toiles les jeunes danseuses qu’il admire avec passion dans les cabarets parisiens. AprĂšs qu’il les a fixĂ©es de ses immenses yeux de rapace nocturne, il s’ingĂ©nie Ă  accrocher aux murs de l’atelier leur portrait qui les reprĂ©sente revĂȘtues de leurs costumes de scĂšne plus ou moins lĂ©gers.  On ne peut qu’admirer le talent de la bĂȘte dont les pinceaux expriment l’amour pour ses modĂšles, ainsi que son tourment de ne pouvoir Ă©tablir une relation rĂ©elle avec elles. Oublions les dĂ©tours philosophiques du personnage complexĂ© qui se sent sale en face des beautĂ©s qu’il admire et qu’il acceptera, semble-t-il aprĂšs leur avoir enlevĂ© leur humanitĂ©, les rĂ©duisant Ă  un Ă©tat animal. Laissons-nous emporter par les dessins dĂ©licats et sensuels des pensionnaires du Moulin Rouge et par une forme de poĂ©sie qui transforme cette histoire en une sorte de conte mystĂ©rieux. (Y.H. et V.L.)