Château d’eau

COMMENT Bernard

Un passant fortuné lui a donné deux billets de mille francs suisses. Quand on est un clochard bernois, ce don du ciel est-il bien monnayable ? Quelle idée saugrenue que ce barrage hydro-électrique qui transformera inexorablement les sommets du pays en château d’eau au milieu des eaux ? Et si on jouait à la loterie uniquement pour le plaisir de trouver la combinaison gagnante ? Etc.

Cinq nouvelles composent ce recueil, cinq textes courts qui parlent de la Suisse ou plutôt des Suisses, se moquent d’un conformisme de « fourmis », d’un respect absurde de l’ordre, d’un réflexe xénophobe qui fait qu’on peut se sentir « trop étranger » ou « mal étranger » dans un pays où la surveillance ne saurait souffrir aucune faille. Bernard Comment confronte les travers de ses compatriotes à de réjouissants opposants : des sages pour qui l’argent ne fait pas le bonheur et qui évitent ce piège à leur liberté, des rebelles individuels à la norme qui refusent d’étouffer au nom de la règle collective ou de pratiques administratives absurdes. S’il ne concernait que la Suisse, le propos serait facile ; il est d’autant plus subversif que sa portée est générale. L’élégance de Bernard Comment est d’avoir choisi d’en rire en offrant comme antidote à cet enfermement la respiration superbe et très drôle de ses cinq héros, dans une langue finement ironique. (C.B. et E.M.)