Cent vies et des poussières

PINEAU Gisèle

Être enceinte, vivre la naissance d’un enfant, le pouponner… par huit fois Gina, sensuelle Guadeloupéenne de trente-sept ans, en a éprouvé le vertige et l’impérieuse jouissance. Les pères sont de passage, leurs rejetons aussi car, dès l’adolescence, ils s’égarent dans les multiples labyrinthes de la délinquance. Sharon, douze ans, témoigne de cette famille chaotique à la vie sordide mais aux liens étrangement rassurants et paradoxalement chaleureux. Dans sa terreur d’en être exclue à son tour, elle invente des visions où les morts visitent les vivants et où l’ombre de l’esclavage plane sur les difficultés économiques de l’île, en 2009. Si les portraits de la mère et sa fille – toutes deux en quête d’amour et d’espérance – dominent le récit, les cent vies de protagonistes attachants et pathétiques croisent leur quotidien qu’habitent les légendes caribéennes et l’histoire locale. La romancière de La morne Câpresse (NB août-septembre 2008), très attachée à ses origines antillaises, s’exprime toujours dans une langue riche, créative, imagée, où déboulent adjectifs et évocations poétiques poignantes et sensibles. Habilement fabriqués, les personnages animent une fabuleuse épopée cruelle, tendre et tonique, sur fond de réalité sociétale.