Ce que j’ai voulu taire

MÁRAI Sándor

Voici le dernier tome des Mémoires de Sándor Márai (1900-1989). Mêlant autobiographie et essai historique, ce témoin consterné analyse la décennie 1938-1948 pendant laquelle son pays fut occupé par les Allemands puis les Soviétiques. Il décrit la soumission du peuple et l’apathie de l’élite bourgeoise décadente qui a oublié sa culture, sa langue et pactisé avec l’ennemi. S’il revendique son ascendance bourgeoise, l’auteur du roman Les mouettes (NB janvier 2014) place haut le statut de cette classe qu’il définit par exigence intellectuelle, lucidité, courage, conscience européenne ; il s’interroge néanmoins sur son authenticité. La mort du pays, des illusions, des valeurs, d’un mode de vie nourrissent ces pages, mais celle de son fils donne, à jamais, sens aux mots douleur et perte. Dans ce beau texte, le lecteur revisite l’histoire de la Hongrie observée par un chroniqueur humaniste et nostalgique qui a donné au terme de bourgeois ses lettres de noblesse.