Trente ans dans une heure

ROUBATO Sarah

Elle va, comme on dit, rentrer dans le rang, celui de la vie active, rassurant pour sa mĂšre. Tout est dit. FermĂ©e la parenthĂšse de libertĂ©, le parc oĂč elle flĂąnait sans but, Ă  la rencontre de soi. Illusion de libertĂ© puisque les enfants eux-mĂȘmes y sont sous surveillance. Existe-t-il encore un espace oĂč se sentir vivre ?

 Difficile de raconter ce petit roman ! Sarah Roubato tourne le dos Ă  la tradition romanesque qui impose une intrigue, des personnages et un dĂ©nouement. Elle choisit un rĂ©cit mosaĂŻque qui enchaĂźne, sans crier gare, l’évocation de moments insignifiants et pourtant dĂ©cisifs dans la vie de personnages anonymes, sans lien ou presque entre eux, sinon une mĂȘme interrogation sur le sens de leur vie. L’auteure cible avec acuitĂ© leurs manques, leurs renoncements, leurs sursauts, ceux d’une gĂ©nĂ©ration pour qui l’avĂšnement des « souris » n’est plus signe d’émancipation. Sans complaisance, sans dĂ©rision, elle dit, avec des mots justes et des formules qui font mouche, ce mal-ĂȘtre contemporain. L’urgence de tĂ©moigner fait naĂźtre une Ă©criture concise, sans fioritures, une voie nouvelle pour la littĂ©rature. (C.B. et F.E.)