Recto verso

Tarik et Rose se rencontrent à Marseille. Sans papiers, frais débarqué de Tunisie, écorché vif, lui se cache dans un container du port. Elle, fragile, flirte avec la drogue dans l’appartement vide de ses parents où elle l’entraîne. Ils s’aiment, se parlent sans se livrer, se quittent…

Seize photos de Téobaldi : intérieur, extérieur ; les unes, au clair-obscur travaillé, les autres, saturées de couleur ; d’autres encore, proches du noir et blanc. Des lieux indéfinissables, des silhouettes de dos, un visage d’enfant qui sourit à l’objectif. Un ensemble énigmatique, troublant auquel donne sens la fiction inventée par Ingrid Thobois. Dans une langue elliptique, pudique, comme hésitant à forcer le sens des images qu’elle s’approprie,  elle met en scène la brève rencontre des deux jeunes gens dans un récit où la voix de l’un prend le relais de celle de l’autre : Tarik puis Rose, deux solitudes, chacun à sa manière, recto verso, volubile ou taciturne. La romancière excelle à suggérer leurs fêlures. Elle leur fait habiter les clichés de Téobaldi : ils en sont nourris autant qu’ils les éclairent. Un photo-roman à l’équilibre parfait.