Le monarque des ombres

CERCAS Javier

Manuel Mena, enrĂŽlĂ© dans une unitĂ© de choc des troupes franquistes, est mort Ă  dix-neuf ans Ă  la bataille de l’Èbre. Il Ă©tait l’oncle de Javier Cercas qui cherche Ă  Ă©claircir la zone d’ombre de sa courte existence. De rencontre en rencontre dans le petit village d’EstrĂ©madure oĂč vit encore sa famille, il dĂ©couvre sa jeunesse, ses longs mois de guerre civile espagnole et sa fin dramatique.     Un hĂ©ros, un martyr, un dĂ©shonneur dans le passĂ© de la famille ? Javier Cercas (L’imposteur, NB novembre 2015) hĂ©site Ă  Ă©crire l’histoire de Manuel Mena. Il regarde son portrait – inclus dans le livre –, Ă©mouvant par sa fragilitĂ© dans son uniforme militaire. Est-il le « symbole funĂšbre » des erreurs d’une rĂ©alitĂ© historique, sociale et politique ? A-t-il cru Ă  la guerre aimable peinte par VĂ©lasquez dans La Reddition de Breda, puis dĂ©couvert la noirceur traduite par Goya dans Tres de mayo ? Aurait-il choisi de se sacrifier ? La rĂ©ussite de ce roman magnifique repose sur des incertitudes tandis qu’une sensibilitĂ© Ă  fleur de peau sublime la lĂ©gende d’un oncle hĂ©roĂŻque, mort pour la mauvaise cause. Dans le dĂ©cor surprenant des derniĂšres pages, de longues phrases rythmĂ©es apportent enfin un certain apaisement. (V.M. et B.D.)