L’affaire Léon Sadorski

Inspecteur à la brigade anti-juive des Renseignements Généraux, pétainiste convaincu, amoureux des femmes et particulièrement de la sienne, Léon Sadorski est en 1942 un fonctionnaire zélé. Brusquement arrêté, conduit à Berlin où il est ravalé au rang des sous-hommes qu’il traque, il en revient plus impitoyable et plus vil, prêt à faire du chiffre. Ce pourrait être l’histoire d’un salaud ordinaire, mais Léon Sadorski, double de Louis Sadosky, fonctionnaire devenu collaborateur de la Gestapo au sein des RG de la Préfecture de Paris, est pire que cela. Dans une fiction riche en détails qui s’inscrit dans la réalité, Romain Slocombe (Le Secret d’Igor Koliazine, NB janvier-février 2016) campe un personnage sans états d’âme, devenu la marionnette des Allemands, malhonnête et corruptible, écoeurant de bassesse et de perversité, abusant de son pouvoir pour envoyer Juifs et communistes (ou prétendus tels) grossir les rangs pour Drancy. Le malaise est grandissant à la lecture des interrogatoires « appuyés » qui font jouir le fonctionnaire. La Cagoule, la Carlingue, en phrases courtes, incisives, l’auteur rafraîchit les mémoires. Si le mot youtre, très présent, est un peu dérangeant, on ne peut qu’être troublé par ce personnage sur lequel Romain Slocombe porte un regard froid et sans concession. (Maje et C.-M.T.)