La route

McCARTHY Cormac

Le monde a Ă©tĂ© anĂ©anti. Il y a longtemps dĂ©jĂ . Le temps est dĂ©mantelĂ©. La couleur a disparu. Une cendre grise, stagnante, cache le soleil, fait l’aube charbonneuse, occulte les ombres. Humains, nature, civilisation sont vestiges. Tout n’est que mort, ruines et pĂ©trification. Dans cet environnement post-apocalyptique, pour Ă©chapper au froid, un homme et son jeune fils marchent vers le Sud, leurs maigres biens dans un hĂ©roĂŻque caddie. Entre Ă©lĂ©ments hostiles et survivants barbares, la route est pĂ©rilleuse


Cormac McCarthy ajuste son style Ă  la situation. Un style de survie, laconique, pelĂ©, dĂ©colorĂ©, morne presque nu, Ă  la fois litanie et inventaire. L’enfant n’a pas connu l’ »avant » et si le pĂšre sanglote parfois, ce n’est pas sur la mort mais sur la beautĂ© et la bontĂ© perdues, sur le Mal, le mutisme de Dieu, des thĂšmes chers Ă  l’écrivain (Des villes dans la plaine (La Trilogie des confins ; III), N.B. juil. 1999). Il Ă©meut par sa volontĂ© aussi persĂ©vĂ©rante que sceptique de prĂ©server, tout en l’armant, la candeur de son fils. Leur tendresse mutuelle, l’altruisme obstinĂ© de l’enfant, bravent l’horreur et le mal, et font naĂźtre, dans ce silence abyssal balayĂ© de stridences, la dĂ©licate, vacillante lueur d’un hypothĂ©tique avenir.