La femme qui tuait les hommes

CASTRO Eve de

Sa chambre de bonne est tapissée de faits-divers sanglants mais le quotidien solitaire de Jeanne, vieille femme modeste, est vide. Jusqu’à sa rencontre avec une jeune amante abandonnée qui la bouleverse. Avec des projets inquiétants, elle s’insinue chez le séducteur, écrivain connu, narcissique et suffisant. Leur intimité progresse. Elle propose à son hôte un sujet de roman prometteur : l’histoire de Lena, une Russe qui a aimé vainement Lénine et assassina deux cent soixante-douze maris violents dans un juste souci révolutionnaire…  

Le passé de Jeanne, se révélant peu à peu plus rempli qu’il n’y paraissait, l’a conduite comme mime au cirque, comme costumière dans les coulisses de l’Opéra, à Samara en Russie. Jamais oublié, l’homme jeune qu’elle aimait mourut dans cette ville où, coïncidence, sont nés également Lénine et Lena. Écrites en prison en 1909, des lettres de Léna à Lénine entrecoupent le récit, retraçant ingénument un terrifiant itinéraire dont l’auteure (Nous, Louis, roi, NB novembre 2015) affirme l’authenticité. L’ambiance prérévolutionnaire russe, dûment documentée, se juxtapose au milieu littéraire parisien actuel. La personnalité polyvalente de Jeanne paraît artificielle, la charpente narrative, laborieuse. Le style est élégant, quelques dialogues sont bien tournés. Mais l’histoire fort curieuse de Lena mériterait un traitement moins compliqué ! (M.W. et A.Be.)