Aussi loin que possible

PESSAN Éric

Ils sont partis sans intention particuliĂšre, un beau matin. En chemin pour l’école, ils se sont lancĂ© un dĂ©fi, Ă  celui qui marche le plus vite et ils ont marchĂ©, marché  Pour l’un, une maniĂšre d’oublier les menaces d’exclusion (il est ukrainien), pour l’autre, d’échapper Ă  la main facile de son pĂšre. Une journĂ©e, puis une autre, cinq en tout, avec petits vols pour se nourrir et effractions pour se mettre Ă  l’abri. Le marathon vire Ă  la fugue.  Le rythme de l’écriture reflĂšte la respiration, l’essoufflement des marcheurs. Les paysages dĂ©filent, urbains d’abord, parkings, zones industrielles, grands axes routiers. Avec les kilomĂštres, la nature apparaĂźt, sentiers, forĂȘts, bords de mer
 Si l’horizon s’élargit, la faim se fait sentir, la fatigue aussi. Les risques grandissent et soudain l’angoisse, avec les avis de recherche placardĂ©s. Pour le lecteur aussi les interrogations et le stress augmentent. L’épilogue est une pirouette qui fait des hĂ©ros les porte-parole d’une campagne contre les politiques d’expulsion. Le rĂ©cit sĂ©duit par son Ă©criture plus que par l‘aventure vĂ©cue, par l’évocation des paysages qui dĂ©filent et les rĂ©flexions du narrateur sur ses relations avec son pĂšre. Il laisse une trace. (A.-M.R. et F.E.)