Au départ d’Atocha

LERNER Ben

Un jeune Américain a reçu une bourse d’une fondation espagnole pour écrire et traduire des poèmes. Dans sa petite chambre mansardée au coeur de Madrid, il travaille peu, fume des joints et prend des tranquillisants, quand il ne hante pas les bars. Il couche avec Isabel et entretient un flirt intellectuel avec Teresa, une galeriste qui s’intéresse à ses rares oeuvres. Rien ne paraît l’atteindre, pas plus l’attentat de la gare d’Atocha que ses prestations mitigées devant des cercles littéraires ou sa vie sentimentale chaotique. Dans ce premier roman, Ben Lerner semble éprouver une certaine jouissance à faire le portrait d’un antihéros, dont l’angoisse se soulage dans l’imposture et le mensonge. Poète lui-même, l’auteur s’interroge sur une conception de la poésie comme reflet d’un malaise existentiel : amas de matériaux d’où rien n’advient, parodie de ce que le poète a de grotesque, expression d’une pathologie, « écran sur lequel les auditeurs projettent leur foi désespérée » ? Ses réflexions alambiquées nourrissent un récit classique, centré sur les états d’âme de l’étudiant et sur ses difficultés linguistiques. Mais la peinture de ce jeune expatrié à la dérive déçoit un peu.