Une passion pour le Y

DORSAN Mary

Une cour d’immeuble Ă  la vĂ©gĂ©tation clairsemĂ©e. Un couple isolĂ©, en conversation autour d’une table de jardin. Lui, brun, maigre, le regard sombre, agitĂ©. Elle, les yeux clairs, attentive. Il s’épanche : sa solitude, son exil, son mal de vivre, l’unique rĂ©confort qu’il trouve dans la beautĂ© singuliĂšre de la vingt-cinquiĂšme lettre de l’alphabet. Elle l’écoute…  Mary Dorsan – c’est un pseudo – nourrit son Ă©criture de son vĂ©cu professionnel en psychiatrie. Comme pour Le prĂ©sent infini s’arrĂȘte (NB octobre 2015), un premier roman fleuve, elle choisit la fiction, cette fois sous forme courte, poĂ©tique, pour faire ressentir la tristesse, et parfois le bonheur, qui naissent au contact de la maladie, de la folie, ou de la mort. Jamais dans l’explication ni dans l’Ă©valuation clinique, ce dialogue Ă©trangement sensible et sourdement militant avec l’homme Y, serre le coeur. Sans aucun misĂ©rabilisme, l’auteur rend hommage Ă  la valeur du dĂ©lire, Ă  la dignitĂ© dans la folie, Ă  la souffrance morale inextinguible. Et dĂ©nonce, en contrepoint, les pratiques et rĂšglements sanitaires sclĂ©rosants qui visent Ă  nier la conscience du malade. Un regard autorisĂ© sur l’altĂ©ritĂ©, une construction romanesque originale portĂ©e par une Ă©criture accessible, attachante. (T.R. et C.B.)