Seul, invaincu

MERLE LoĂŻc

AprĂšs quelques annĂ©es passĂ©es dans des zones de combat, Charles, le narrateur, qui s’est engagĂ© dans l’armĂ©e, revient dans sa ville natale pour se rendre au chevet de Kerim, le hĂ©ros de son enfance, atteint de leucĂ©mie. Une amitiĂ© fusionnelle les liait jusqu’au moment oĂč il a rĂ©alisĂ© que son idole l’entraĂźnait dans une dĂ©linquance Ă  caractĂšre maffieux. Se rejoue dans ces retrouvailles une relation de fascination-rĂ©pulsion que Charles a justement cherchĂ© Ă  fuir. AprĂšs diverses tentatives pour reconstruire une vie ensemble ou chacun de son cĂŽtĂ©, c’est le doute qui l’emporte La maladie, l’exil, les affrontements identitaires servent de cadre Ă  ce monologue intĂ©rieur oĂč l’auteur (L’esprit de l’ivresse, NB octobre 2013) s’attarde longuement sur l’ambiguĂŻtĂ© des relations entre deux adolescents devenus hommes. Une Ă©criture recherchĂ©e et subtile mĂȘle, sans ligne de partage claire, la rĂȘverie, la rĂ©flexion, les sentiments, l’action. Mais c’est dans ce parti pris stylistique que surgit le malaise. Car la lĂ©gĂšretĂ© quasi onirique du rĂ©cit, sa principale qualitĂ©, rend celui-ci inaudible et le met en contradiction permanente avec la violence des faits qu’il est censĂ© rapporter : un fossĂ© que le talent ne parvient pas Ă  combler.