Mourir sous ton ciel

PRADA Juan Manuel de

En 1898, aux Philippines, l’Espagne déliquescente affronte mollement la révolte indépendantiste indigène secrètement soutenue par les Américains. Elle capitule bientôt, abandonnant l’archipel ravagé aux intérêts yankee. Dans un village lointain, une garnison résiste. Au fil des mois, entre la belle nonne rebelle, le révolutionnaire généreux, le mélancolique capitaine, le religieux tireur d’élite, la belle métisse, les soldats, le lieutenant jusqu’au-boutiste, l’ignoble marchand d’armes, amours, amitiés et passions mauvaises circulent d’un camp à l’autre, à l’ombre de la mort annoncée.   Autour de cet épisode véridique, Juan Manuel de Prada, écrivain espagnol reconnu (Le septième voile, NB février 2009), a construit un roman vibrant, véhément, monumental. L’ironie, la tendresse, la poésie, l’horreur y déferlent par vagues, l’honneur et l’amour paternel aussi bien explorés que la perversité ou la folie. Tout y est : le romanesque avec des personnages à chérir ou détester intensément ; la vie coloniale si injuste et sa fresque sociale, du conscrit au gouverneur ; le climat, la jungle où rôdent les coupeurs de têtes ; l’armée, l’Église… Ce récit, soutenu par une réflexion philosophique et politique, emporté par une écriture aux tournures et vocabulaire d’une séduisante richesse, continue, malgré ses ralentissements et longueurs, de vivre dans la mémoire.  (M.W. et M.Bo.)