Maman les p’tits bateaux

MAZARD Claire

Depuis le 16 mai 2018, une collĂ©gienne a marquĂ© d’une croix noire tous les mercredis oĂč son oncle, le frĂšre adorĂ© de sa mĂšre, est venu meurtrir son enfance : abus sexuel, perversitĂ© pour imposer le silence. Elle chante dans sa tĂȘte Maman les p’tits bateaux dans une tentative dĂ©sespĂ©rĂ©e de prĂ©server sa chambre du dĂ©goĂ»t. Un ordinateur reçu pour son anniversaire devient son confident.

Le roman est le journal que l’adolescente tape sur le clavier, celui d’actes pĂ©dophiles rĂ©pĂ©tĂ©s vingt fois. La parole est forte : elle dit la rupture de confiance avec un parent proche qui a ensoleillĂ© son enfance puis dĂ©truit le prĂ©sent et menacĂ© l’avenir ; elle dit aussi les violences que la victime impose Ă  son corps pour ĂȘtre moins sĂ©duisante, pour appeler au secours, trop longtemps sans effet ; s’ajoute, dans cette infernale chronologie, la peur de tomber enceinte quand elle devient pubĂšre. Tout est posĂ© dans ce rĂ©cit, y compris, Ă  l’approche du dĂ©nouement, le poids de la dĂ©nonciation. La sobriĂ©tĂ© du texte rend palpable une tension dramatique au plus prĂšs du drame vĂ©cu. Une rĂ©Ă©dition bienvenue (Casterman 2000). ( A.-M. R. et C. B)