L’Île

SELIMOVIĆ Meša

À sa retraite Yvan quitte, avec Katarina sa femme, la ville où ils ont mené une vie terne, rétrécie et sans amis ; ils y laissent deux fils devenus indifférents. Ils s’installent sur une île dalmate proche, envisagent un avenir régénéré par de nouveaux contacts. Une voisine bavarde, un neveu inconnu les surprend, des pêcheurs les croisent, un chien mendie un regard, la nature les éblouit : quelques moments d’oublis et d’émotions fugaces dans un quotidien d’angoisse et de refus. Cet ouvrage singulier écrit en 1974 par un écrivain serbo-croate est-il un recueil de nouvelles ou un roman ? Malgré l’absence d’une intrigue bien posée, la succession de chapitres précisément titrés et clos par une chute inattendue multiplient les éclairages sur le présent, le passé, les rêves du couple douloureux mais indissoluble. Et si l’auteur situe son récit sur L’Île, symbole d’isolement mais aussi terre d’accueil, c’est pour mieux souligner le parcours de ces êtres résignés, pessimistes, incapables de confiance en l’homme et en eux-mêmes, engloutis dans leurs questionnements existentiels fondamentaux. Ce thème s’appuie sur une belle écriture riche, claire, poétique qui rend attachante la découverte de ces destinées sans joie.