Lèvres de pierre

HUSTON Nancy

Salah Sâr, jeune Cambodgien de bonne naissance, collectionne, de 1934 à 1953, échecs scolaires et humiliations jusqu’à sa découverte de la politique à Paris. En 1953, il rejoint le parti communiste, peaufine une idéologie terrifiante et, en 1970, devient Pol Pot. Fascinée par le Cambodge, Dorrit, jeune Canadienne, vit en 1963 une enfance américaine marquée par l’insécurité familiale, une expérience sexuelle précoce et traumatisante et se fixe en France en 1979. Deux figures que rien ne semble rapprocher, et pourtant…  L’auteur du roman (Le club des miracles relatifs, NB mai 2016) s’incarne dans son héroïne et, dès le prologue, définit la trame de son récit. Son style net et agréable dévoile, en deux récits successifs, la vie de ses personnages. En apostrophant Pol Pot et en se réservant le ton de la narration pour une autobiographie romanesque, elle souligne non sans artifice les correspondances de ces parcours, met en miroir leurs itinéraires, ce qui laisse perplexe. Ce roman interroge les Lèvres de pierre des statues khmères et des protagonistes des récits pour mettre en lumière l’aveuglement d’une certaine intelligentsia face au drame du peuple cambodgien victime du marxisme le plus dogmatique et sanglant qui soit. (A.C. et A.K.)