Les cousines

VENTURINI Aurora

Étrange famille que celle de ces deux jeunes cousines argentines. L’endogamie ou le hasard y ont multipliĂ© les handicaps : dĂ©gĂ©nĂ©rescences congĂ©nitales parfois profondes et disgrĂąces physiques. Yuna, gravement dyslexique, tient pourtant un journal. Observatrice finement naĂŻve, candidement questionneuse de son milieu, elle dĂ©crit sans fard les tares, sans pudeur les moeurs, sans censure les sordides postures de son calamiteux entourage. Surtout, elle traduit en peinture les situations rencontrĂ©es et sa crĂ©ativitĂ© reconnue sera sa rĂ©demption.

 

Pour ce roman sombre, Aurora Venturini, philosophe, psychologue, a reçu en Argentine un prix littĂ©raire prestigieux. Que son propos soit la dĂ©bilitĂ© mentale, les perversitĂ©s sexuelles, les carences de la communication, les dĂ©gĂąts collatĂ©raux d’une religion mal intĂ©grĂ©e, elle prĂȘte sa plume Ă  Yuna. Dans la premiĂšre moitiĂ© du livre ses phrases courtes se colorent de cruditĂ©, de franc-parler, de cruautĂ© enfantine. Elle tricote tonalitĂ©s puĂ©riles presque poĂ©tiques et accents graveleux et salĂ©s. La rĂ©Ă©ducation du retard langagier par la volontĂ© de l’hĂ©roĂŻne et sa croissance autorisent l’auteur Ă  changer ensuite pour un style plus Ă©laborĂ©. Dans ce cadre dĂ©rangeant, dĂ©crit talentueusement avec une brutalitĂ© vaguement complaisante, on retient la possibilitĂ© d’une grĂące.