Vers 1980, le procès d’un ancien tortionnaire, dit “briseur de têtes”, remue les Viennois. La génération postérieure se trouve interpellée par l’attitude de ses parents au temps du nazisme. L’auteur, fils de déportés, met face à face de multiples personnages : chacun est renvoyé au passé de ses pères et mères, juifs, nazis ou communistes et glisse dans le doute, la culpabilité et une attirance vers ceux de l’autre bord.
Dès les premières pages du roman, publié à Francfort en 1992 (un film en a été tiré en 2002), un récitant qui restera mal défini raconte à la première personne les aventures, les réflexions et les démarches des protagonistes. L’identification difficile des personnages, désignés alternativement par leur prénom ou leur nom seul, prolonge l’incertitude du lecteur. L’écriture, en phrases nettes, passe en de courts chapitres des uns aux autres, coiffant la diversité des destinées. Une atmosphère lourde pèse de plus en plus sur le lecteur qui entre ainsi dans la familiarité de personnages très humains, auxquels il s’attache, et dont l’origine s’estompe devant des fatalités parallèles. Signalons un bon glossaire de termes juifs.