À Dublin, ville où sévit une crise politique, Larry Stack, enseignant et syndicaliste, sa femme Eilish, scientifique, et leurs quatre enfants de dix-sept à un an forment une famille unie. Interpelé par une police secrète, Larry disparaît, définitivement. Eilish élève seule les enfants et s’occupe de son père, perturbé. La dictature plonge le pays dans le chaos totalitariste, la guerre civile s’installe entraînant malheurs, morts et désespoir.
Paul Lynch (Au-delà de la mer, Les Notes septembre 2021) montre l’inutile ténacité des habitants à refuser les nouvelles règles et leurs implications : le visage d’un pays inconnu s‘impose par force et coercition installant une terreur paralysante. L’héroïne, fabuleuse mère courage, mise en scène par le narrateur-prophète, domine le roman servi par une écriture serrée souvent sans ponctuation, sans paragraphe ni dialogues, accentuant l’effet anxiogène de l’histoire balayée par souvenirs ou évasions oniriques. Cet exemple irlandais, frappé par une dictature d’extrême droite, livre-t-elle à notre réflexion une possible dystopie ? Et dans ce beau livre, l’auteur invite, en raison de la fracture d’un paysage politique, à penser la désintégration de l’individu, son enfer intérieur parfaitement étudié et ressenti. Dans cette situation dramatique, seule la vision finale de la mer ouvre, comme dans notre actualité, un autre possible. (A.C. et A.Be.)