Ederlezi : comédie pessimiste

ČOLIĆ Velibor

À Ederlezi, le jour de la saint Georges, la plus grande fête tzigane, on célèbre le printemps. À Strehaïa, il n’y a ni église, ni mosquée, ni mairie. Il y a des hommes, tous cousins, dont le patronyme a varié en fonction de l’occupant : turc, serbe, albanais, macédonien… Azlan Baïramovitch est né le 6 janvier 1902. Digne héritier de ses ancêtres, il se révèle un musicien prodige. Chanteur polyglotte, il parcourt l’Europe centrale à la tête de son orchestre Ploska, jusqu’à ce soir de 1943 où sa route croise celle des Oustachi, les fascistes croates… Mais « rien n’est définitif, y compris la mort. » Ce récit exigeant, au puissant pouvoir évocateur, nous emporte dans l’univers des Roms. Avec humour et dans un style parfois déroutant, Velibor Čolić (Sarajevo omnibus, NB juin 2012) en décrit les excès : filouterie, palabres, raki et autres alcools. Il en montre aussi la séduction, douceur et poésie, et la grandeur. Dans une mise en scène assez théâtrale, il rappelle le destin d’une communauté stigmatisée et martyrisée. Cette « comédie pessimiste » dénonce avec originalité la bêtise humaine au son parfois étourdissant du violon, de l’accordéon et de la clarinette.