Dans La Rédactrice (2023), son premier livre publié, Michèle Cohen défendait son goût du mot juste, de la brièveté du message, de la charge de sens de l’anecdote, même si au départ son écriture avait été jugée « plate » par sa professeur de lettres ! Sa formation de rédactrice publicitaire a renforcé son goût de l’écriture précise, efficace et exacte. Pour son passage plus tardif à la littérature, elle y introduit naturel, souplesse, élégance, malice et sensibilité.
Cette fois, c’est sous la forme de portraits entrecroisés qu’elle parcourt ses souvenirs. Des amis qui ont compté dans sa vie et sur la durée, dans des formes de relations très diverses. Elle ne cache pas les difficultés, les pertes et les douleurs, qui ont troublé ou parfois renforcé la relation amicale. Des histoires simples : l’ami squatter, le retour des cendres d’un cinéaste argentin, un demandeur d’asile suivi pendant plusieurs décennies, une psychanalyste rencontrée in extremis. Ou plus extravagantes : la folie immobilière d’une amie de toujours, la demande en mariage blanc du nain de la troupe du Grand Magic Circus. Et depuis toujours, le cercle des amis de Spinoza : c’est son dada, sa conception morale de l’amitié, sa philosophie. Les milieux artistiques que l’autrice a fréquenté dès les années 70 (théâtre, cinéma, radio, littérature) pouvaient l’entraîner sur la pente du name dropping. Elle évite l’écueil même si au détour d’une anecdote toute simple, dans un escalier, on croise Georges Perec — tout de même ! (T.R. et E.M.)
