Paul Nizan : la révolution éphémère

BUIN Yves

Nizan niait que « vingt ans [fût] le plus bel âge de la vie », l’âge où pourtant ce brillant normalien, de la promotion de Sartre et Aron, écrit Aden Arabie et rencontre le succès. Déjà s’y révèle une écriture puissante, sans équivalent chez ses contemporains. Ses attaques contre la société bourgeoise s’exacerbent dans Les chiens de garde (1932) ; une réflexion critique marxiste sur les mandarins de la pensée entraîne logiquement son inscription au Parti communiste, avec Henriette, sa femme. Suivent six années de journalisme militant, où ce pamphlétaire lucide se conforme paradoxalement à la ligne du Parti, jusqu’à sa rupture en 1939, suite au Pacte germano-soviétique. Il est tué en mai 1940 lors de l’offensive allemande.  Biographie d’un radical surdoué, trop tôt disparu, ce texte intelligent est aussi celle d’une génération effervescente, exceptionnellement riche, se cherchant entre fascisme et communisme en construction, peu consciente de leurs possibles évolutions. Yves Buin, médecin, auteur de biographies (Céline, Kerouac…) articule avec talent la vie de Nizan autour de questions sur l’art, la liberté, l’engagement face aux totalitarismes naissants, là où la guerre a, depuis, tranché. Finesse des portraits, richesse de la bibliographie : une belle évocation d’une personnalité prometteuse.