Murène

GOBY Valentine

Février 1956 dans les Ardennes. Une épaisse couche de neige recouvre champs et bois. Le poids-lourd qui transporte François, vingt-deux ans, tombe en panne. Parti chercher du secours, le jeune homme escalade un wagon isolé resté sous tension. Il est foudroyé. Retrouvé par miracle, il survit à des brûlures gravissimes et doit être amputé des bras et des épaules. Au fil des ans, après de longs séjours à l’hôpital, il tente de se reconstruire.   La mort n’aurait-elle pas été préférable ? François n’est plus que douleur. Privé si jeune de toute autonomie, de possibilité d’aimer, de travailler, il ne peut se figurer un avenir et même en refuse l’idée. Avec une acuité saisissante, l’auteure (Je me promets d’éclatantes revanches, NB septembre 2017) fait émerger ce sentiment de dépossession totale à travers un flux croisé de consciences sidérées, celle de François d’abord puis celle des témoins, de sa mère, des soignants. Dans cette partition grinçante sont peu à peu convoqués tous les types de handicaps, de soins, d’essais, d’échecs. La solidarité – ici par le sport – esquisse au gré d’actions minuscules, invisibles, une petite musique obstinée qui répète (non sans quelques longueurs) combien le goût de vivre est tenace. (A.Lec. et F.L.)