L’homme descend de la voiture

PATROLIN Pierre

Le narrateur roule au volant d’une voiture neuve. Il roule entre son domicile campagnard et son bureau situĂ© dans la ville voisine. Le ronronnement du moteur, l’odeur des siĂšges, le plastique du tableau de bord le fascinent. À l’insu de sa femme, il fait des dĂ©tours par des routes secondaires, voire des chemins forestiers, simplement pour rouler. Un jour, il trouve un vieux fusil dans sa cave et le cache dans le coffre. Tandis que son obsession de rouler grandit – il multiplie ses escapades, dĂ©serte son bureau, sans l’avouer Ă  quiconque – la prĂ©sence clandestine du fusil dans le vĂ©hicule fait basculer sa vie. Il ne se passe rien ou presque dans ce monologue intĂ©rieur oĂč revient inlassablement un quotidien fait d’allers et retours en voiture entre la maison et le bureau. C’est pourtant de la rĂ©pĂ©tition mĂȘme de cette situation ordinaire qu’émerge insensiblement une dynamique romanesque particuliĂšre Ă  l’auteur (La montĂ©e des cendres, NB fĂ©vrier 2013) : l’irruption subreptice de l’insolite, le passage insensible du banal Ă  l’obsessionnel, et mĂȘme Ă  l’hallucinatoire, Ă  partir des mots les plus simples. Une Ă©criture sobre, directe, trĂšs Ă©vocatrice, la maĂźtrise d’un vocabulaire exceptionnellement variĂ© servent cet Ă©pisode intime au dĂ©nouement dĂ©concertant.