L’été Diabolik

SMOLDEREN Thierry, CLÉRISSE Alexandre

Un début d’été tranquille tourne peu à peu au cauchemar pour un adolescent de quinze ans. L’explication ne lui sera donnée que des années plus tard. Une sombre histoire d’espionnage, servie par un scénario complexe et habile et une palette changeante dont les tonalités s’adaptent aux rebondissements de l’histoire. Antoine passe ce début d’été dans une station balnéaire, où l’a entraîné son père, et y coule une vie d’adolescent aisé. Au tennis, il gagne le tournoi du lieu, devient l’ami d’Éric, son adversaire, et fait la connaissance de la jeune Anglaise Joan, gardienne de la maison d’un certain M. Noé. Pendant ce temps, son père rencontre deux personnages : le père d’Éric, particulièrement agressif à son encontre, et ce Noé qui le reconnaît et lui tient des propos bizarres où il serait question de souvenirs communs et d’un espion, Popov… Pourquoi le père d’Éric poursuit-il en voiture Antoine et son père, au point de se tuer dans un accident de la route ? Que fut-il pendant la guerre ? Nazi ? Et le père d’Antoine, quelles raisons subites l’expédient en Allemagne pendant le week-end ? Les deux jeunes ados s’offrent un bain de minuit avec des Nordiques, puis Antoine retrouve Joan, avec laquelle il découvre à la fois l’amour physique et l’égarement d’un trip de LSD. Son père revient d’Allemagne, déprimé et préoccupé, puis, disparaît définitivement. C’est alors que tout bascule, le récit devient un thriller impitoyable dont les clés ne seront données à Antoine que des années plus tard, dans une seconde partie où se dévident toutes les ficelles de l’intrigue, sombre histoire d’espionnage.  Le scénario complexe est mené avec une habileté « diabolik ». Ce récit, dont l’intérêt et la tension croissent progressivement, est conçu comme un jeu de piste au cours duquel se laissent découvrir des indices. Le suspense est remarquablement mis en valeur par l’univers très personnel de Clérisse. Sur sa palette graphique, seuls les visages voient leurs expressions soulignées de quelques traits de plume. Chaque planche présente des compositions originales aux découpages libérés où les images ne sont faites que de couleurs en à-plats juxtaposées. Couleurs dont la palette participe à la narration : légère, acidulée et chatoyante au début, elle devient de plus en plus contrastée et s’assombrit au fur et à mesure que l’intrigue se noircit. Une réalisation habile et mystérieuse.(Y.H. et H.T.)