Les magnolias

OISEAU Florent

Acteur peu sollicitĂ©, Alain, la quarantaine largement entamĂ©e, se laisse vivre, ajourne, procrastine, attend une figuration, un rĂŽle, en faisant des listes de mots, des prĂ©noms pour poneys par exemple… Pourtant, au coeur de ce dĂ©soeuvrement languide, il a trois habitudes immuables : la demi-heure matinale dans la camionnette de travail de Rosie, la putain au grand coeur ; la visite du dimanche aprĂšs-midi aux Magnolias, l’Ehpad oĂč dĂ©cline sa grand-mĂšre, et la virĂ©e quasi mensuelle en Dordogne pour dormir une nuit dans la maison vide de cette derniĂšre.  AprĂšs
 Florent Oiseau (Je vais m’y mettre, HdN aoĂ»t 2016) raconte les heures nonchalamment Ă©grenĂ©es d’un loser cordial, sensible ou parfois indiffĂ©rent, sa passivitĂ© assumĂ©e, sa prĂ©occupation tranquille du dĂ©risoire, sa tendresse sourcilleuse pour son aĂŻeule. Avec de petites phrases en quĂȘte appliquĂ©e de l’accessoire, toujours Ă  la premiĂšre personne dans la bouche du hĂ©ros, lĂ©gĂšrement imbibĂ©es d’autodĂ©rision, l’auteur pratique une certaine et lente cĂ©lĂ©bration de l’anodin aux vertus sĂ©datives. Un apaisement qui gagne le lecteur et le menace d’assoupissement. Mais les sursauts inattendus du dernier tiers du roman remodĂšlent avec bonheur le tempo du style, colorent de sens l’indolence et de plĂ©nitude la tendresse. (C.R.P. et J.M.)