Les anciens dieux blancs de la brousse

En 1982, alors que la Haute Volta – futur Burkina Faso – connaît une situation politique instable chronique, avec coups d’État fréquents, les membres de la communauté blanche de la capitale, Ouagadougou, s’adaptent avec philosophie aux événements. Autour de l’ambassadeur de France, énarque bon teint, gravite un monde hétéroclite : aviateur baroudeur carburant à la vodka, journaliste globe-trotter blasé, vieux colon aux onze mille hectares de café ou métis sillonnant le désert avec son 4×4. De son côté, le petit peuple vaque à ses diverses occupations…

L’auteur passe au crible d’une ironie mordante la politique africaine, mais épingle tout autant la politique de la France en Afrique sans craindre d’évoquer quelques figures connues… Plus ambitieux que Dans la chambre du pornographe (NB mars 2005), ce long récit possède une dimension historique, étayée par une grande érudition. Jean Billeter prend un réel plaisir à donner corps à ses personnages sans tomber dans la caricature et surtout à leur donner voix. Le registre est vaste, du très savoureux parler local à la langue compassée du représentant du Quai, et l’on sourit beaucoup. Un roman tour à tour sombre et lumineux, aguicheur et sérieux.