L’assassinat de Clemenceau

LE NAOUR Jean-Yves

19 fĂ©vrier 1919. Émile Cottin, vingt-trois ans, tire neuf balles sur la voiture conduisant Clemenceau au ministĂšre de la Guerre, blesse le chauffeur, atteint le prĂ©sident du Conseil au poumon. Quasiment lynchĂ© par la foule, le tireur est protĂ©gĂ© par les policiers. Cette haine bientĂŽt gĂ©nĂ©rale profite Ă  la popularitĂ© de Clemenceau. Les rĂ©actions de la presse suscitent d’intenses polĂ©miques. La tentative d’assassinat passe pour un complot bolchevique, entraĂźne arrestations et saisies. L’anarchiste solitaire, se rĂ©vĂ©lant bien falot et terne, est vite condamnĂ© Ă  mort, peine commuĂ©e Ă  l’instigation du Tigre, rapidement guĂ©ri. 

Jean-Yves Le Naour (Histoire de l’abolition de la peine de mort, NB juin 2011), spĂ©cialiste de la premiĂšre guerre mondiale, dĂ©crit prĂ©cisĂ©ment le contexte d’aprĂšs-guerre, l’atmosphĂšre gĂ©nĂ©rale, le rĂŽle de la presse qu’il cite abondamment, photos Ă  l’appui. Il souligne, d’une plume souvent ironique ou amusĂ©e, la vĂ©hĂ©mence et la politisation excessive des journaux, la rĂ©cupĂ©ration de l’évĂ©nement, la justice de classe. Comme Ă  l’Ă©poque, il compare le procĂšs Cottin au procĂšs concomitant de l’assassin de JaurĂšs qui – verdict inouï – est acquittĂ© ! L’analyse de la personnalitĂ© de Cottin, vite oubliĂ©, l’évocation efficace d’une Ă©poque et de sa presse animent ce rĂ©cit d’un Ă©vĂ©nement mineur. (S.La. et M.W.)