Un jeune homme décroche grâce à ses parents un emploi de serveur dans un grand restaurant. Éberlué, il découvre un milieu professionnel inconnu où il est d’emblée considéré comme pistonné et incapable, puis devient peu à peu victime et bouc émissaire de toutes les avanies que la direction impose au personnel. Chacun de ses gestes et chacune de ses paroles sont tournés en ridicule. Serveur pourtant doué, soumis aux codes, il est calomnié, humilié, déshumanisé jusqu’à l’esclavage… Ce premier roman d’un jeune journaliste, en forme de conte cruel, dénonce ironiquement le monde contemporain du travail. Le héros, victime de bizutages brutaux, d’humiliations mises en scène dans un décor tour à tour réaliste et fantasmatique, présente, par métaphores interposées, un monde de compétition féroce. L’auteur livre l’image outrée d’une société cynique et désabusée, d’une machine à broyer les individus, les rejetant sans pitié de plus en plus vite, sans états d’âme. Ce constat amer, sans concession, en forme de fable philosophique, sur la mise en demeure de choisir son destin tout en étant privé de la lucidité qui lui permettrait de le construire, est très réussi. L’intrigue, déstabilisante, est tendue sur le fil du rasoir.
La chance que tu as
MICHELIS Denis