Kintu

MAKUMBI Jennifer Nansubuga

1750, province du Bugunda (confins de l’actuel Ouganda). Le gouverneur Kintu Kidda, chef de clan et père de nombreux jumeaux, tue accidentellement son fils adoptif. Parce que cette mort est dissimulée, un sort est jeté sur toute sa descendance de la fin du XVIIIe au début du XXIe siècle.  Une malédiction qui voue toute la lignée à la folie, au suicide ou à une mort violente, est à l’origine de cette oeuvre ambitieuse, polyphonique et métaphorique. Le récit, très sombre, dans lequel on se perd parfois, emporte dans une fiction hyperréaliste et saisissante. Le destin des personnages tourmentés de cette grande saga africaine déborde largement le champ du roman pour autopsier une société patriarcale, tiraillée entre animisme et héritage post-colonial. La romancière pose un regard acéré et lucide, parfois ironique, sur les maux de son pays. Elle aborde sans filtre et interroge notamment les liens de sang, les rapports à la religion, la pauvreté et la place des femmes incarcérées dans un machisme qui permet tous les abus. L’immersion est violente, on ne ressort pas indemne de ce livre couronné de prix à l’étranger. (R.C.G. et L.D.)