Une scène de théâtre, deux acteurs : un vieil homme affalé dans un fauteuil, cigare dans une main, verre de whisky dans l’autre, fait face à un autre en train de le peindre. On identifie très vite Winston Churchill, un peu moins facilement le peintre Graham Sutherland qui fit de lui, à l’âge de quatre-vingts ans, un portrait d’une criante vérité qui provoqua un scandale à l’époque. Les deux hommes discutent… Que reste-t-il d’une vie, si glorieuse fut-elle ? Acte après acte, les deux personnages s’affrontent, se jaugent et se dévoilent peu à peu sans fard. Aucune ambition historique dans cet étonnant dialogue entre le « lion rugissant » et son portraitiste un peu oublié qui, on le découvre, ont vécu le même drame. Plutôt une réflexion désabusée sur la finitude humaine et l’empreinte indélébile que laissent dans l’âme les chagrins d’une vie. Le monde est une scène et nous sommes tous des comédiens, dit Philippe Forest (L’oubli, NB janvier-février 2018). Le théâtre est le miroir de la vie et chacun de nous peut s’y reconnaître. Un petit livre à la forme et au thème originaux, au goût amer, qui démythifie les hommes célèbres. (M.-N.P. et V.A.)
Je reste roi de mes chagrins
FOREST Philippe