Et la fureur ne s’est pas encore tue

APPELFELD Aharon

Aharon Appelfeld retourne inlassablement sur son passĂ©. Ici le jeune Bruno, manchot Ă  la suite d’un accident dont il n’a pas la mĂ©moire, se souvient de son enfance avec des parents juifs communistes, trĂšs tendres. Son pĂšre est emprisonnĂ©, sa mĂšre et lui dĂ©placĂ©s dans le ghetto de leur petite ville de Roumanie. Ils survivent jusqu’à ce que Bruno soit internĂ© dans un camp. Pourquoi ses compagnons et lui construisent-ils tous ces baraquements ? Pourquoi ces fours qui ne sont pas industriels ? C’est la fuite hors du camp et la longue survie dans la forĂȘt. Bruno a dix-sept ans. On le retrouve en Italie oĂč il a ouvert un centre d’accueil pour les dĂ©portĂ©s en quĂȘte d’eux-mĂȘmes et d’une certaine reconstruction. Et lĂ , le rĂ©cit devient dĂ©concertant, ce qui dĂ©soriente le lecteur.  Tout se mĂȘle dans ce rĂ©cit, les souvenirs d’enfance, la dĂ©couverte de la particularitĂ© juive, le ghetto, le camp, les dĂ©portĂ©s en perdition, IsraĂ«l la terre promise. Les personnages sont emmurĂ©s dans leur silence, le hĂ©ros se sert de son moignon, sorte d’allĂ©gorie, pour comprendre le monde, communiquer avec ses parents morts, avec ses compagnons lointains, se comprendre lui-mĂȘme. Comme dans chacun de ses ouvrages prĂ©cĂ©dents (La chambre de Mariana, NB avril 2008), Aharon Appelfeld Ă©crit par petites touches, dans une langue pleine de sensibilitĂ© et d’émotion.