En finir avec Eddy Bellegueule

LOUIS Édouard

Eddy est un garçon d’une dizaine d’annĂ©es, nouveau dans le collĂšge d’un village dĂ©shĂ©ritĂ© de Picardie. DĂšs le premier jour, il subit la violence de deux grands : « C’est toi le pĂ©dĂ© ? ». Il raconte sa peur, les coups reçus, son dĂ©sarroi, sa honte et celle de sa famille, ses tentatives dĂ©sespĂ©rĂ©es pour « ĂȘtre un dur », la dĂ©couverte de son attirance pour les garçons, le dĂ©goĂ»t de soi, l’inacceptable diffĂ©rence pour ce milieu populaire oĂč la virilitĂ© va de pair avec l’alcoolisme, la brutalitĂ©, la domination de la femme. Ce garçon n’est autre que l’auteur. C’est toute la force de ce rĂ©cit, rencontre de deux mondes dont la diffĂ©rence est soulignĂ©e par l’alternance de deux langages: l’un, en italique, souvent vulgaire, blessant, trivial, est le reflet de la vie du petit village et de l’atmosphĂšre familiale, l’autre, pudique, distanciĂ©, est une narration claire, factuelle et sans recherche d’effets, des blessures morales et physiques infligĂ©es. Certaines scĂšnes sont d’un rĂ©alisme terrible. Ce n’est pas un rĂšglement de comptes mais un constat d’échec qui se termine par une fuite de ce monde peu instruit oĂč rien ne pourrait changer. Le procĂ©dĂ© littĂ©raire est criant de vĂ©ritĂ©, mĂȘme s’il stigmatise. La concision explicite de ce premier « roman » impressionne.