Deux heures moins dix

Séparés dans l’espace et dans le temps, deux amants russes correspondent. Ses lettres à elle sont de notre époque. Lui, c’est vers 1900 qu’il s’exprime, depuis Tientsin où son régiment est engagé dans la coalition internationale de défense des concessions occidentales. Les lettres ne sont pas datées et ne se répondent pas. Il s’agit plutôt de monologues alternés. Il parle de la guerre et ses horreurs. Elle évoque son passé, son couple, les derniers mois de sa mère, avec laquelle ses rapports furent longtemps difficiles. Ces souvenirs, ces émotions, ces interrogations touchent à tout ce qu’implique la condition humaine intemporelle : l’amour, les âges de la vie, les mots, la maladie, les relations intergénérationnelles, la façon dont chacun envisage – ou non – sa propre mort. La guerre des Boxers illustre la confrontation de vieilles civilisations qui se méconnaissent et se méprisent. L’écriture forte, avec parfois des touches poétiques, avait déjà été appréciée dans La Suisse russe (NB août-septembre 2007), mais la forme de ce nouveau roman demande au lecteur une certaine ouverture d’esprit.